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A la une / Témoignage

Changer le monde, un enfant à la fois

La semaine dernière, j’ai eu peur. Ce weekend, j’ai repris confiance.

Qu’autant de gens puissent se rassembler dans la fraternité et dans la bienveillance, sans incident, me remplit d’espoir.

En ce début de semaine, je me réveille doucement, comme après un rêve. Le dénouement que j’attendais est là, et pourtant je me sens encore fébrile. Mon quotidien paraît tellement fragile à la lumière de la violence que nous avons fréquentée la semaine dernière. Ma routine habituelle paraît encore futile à côté des grandes idées que nous avons côtoyées ce weekend.

Et pourtant.

Je sens qu’il y aura un avant et un après. Je sens qu’il va me falloir du temps pour panser mes plaies. Et je sens aussi que je n’en ai pas complètement envie.

Je veux garder à l’esprit pour toujours la fragilité fuyante de la vie qui la rend si précieuse.
Et je veux installer ces idéaux durablement dans mon quotidien, y compris au sein de ma famille.

J’ai beaucoup entendu ces derniers temps : « Quand je vois l’état du monde, je me demande si cela vaut le coup de faire un enfant. »

J’ai le raisonnement inverse. Quand je vois l’état du monde, je me dis que ce sont les enfants qui portent en eux la graine du changement.

Je l’ai souvent dit ici : les enfants apprennent par l’exemple. Alors comment espérer que notre société soit plus juste, bienveillante, non-violente et humaine ? En incarnant l’exemple de la justice, de la bienveillance, de la non-violence et de l’humanité au sein de nos familles.

Pour donner exemple à nos enfants.

Alors aujourd’hui plus que jamais, je veux que mes enfants me voient vivre ces idéaux au quotidien.

Je veux continuer à dialoguer avec mes enfants. À leur parler, à être honnête avec eux, à tenter de trouver les mots justes, à ne pas toujours y parvenir mais à l’accepter, parce que je ne suis pas parfaite et qu’être parent c’est aussi ça.

Je veux qu’ils me voient écouter même quand je ne suis pas d’accord. Je veux qu’ils puissent s’exprimer même quand ce qu’ils disent ne m’arrange pas. Je veux qu’ils voient que chacun a le droit de s’exprimer, même les plus petits, même quand il faut faire un effort pour les écouter et les comprendre.

Je veux être un exemple de tolérance pour mes enfants, qu’ils me voient échanger avec plein de personnes différentes et aller à la rencontre de l’autre dans le respect. Je veux qu’ils me voient donner aux autres le bénéfice du doute plus souvent que je ne les juge à l’emporte-pièce. Je veux qu’ils me voient m’excuser quand j’ai tort, auprès d’eux ou auprès des autres.

Je veux qu’ils me voient ouvrir le dialogue plus souvent que je ne le ferme. Je veux qu’ils apprennent quels mots appellent le dialogue et quels mots le tuent. Je veux qu’ils fassent l’expérience que le dialogue est efficace plus souvent qu’il ne l’est pas.

Je veux qu’ils se sentent en sécurité avec moi. Je veux qu’ils constatent que contraindre par la violence n’est pas une option acceptable, quelles que soient les situations, tant que toutes les autres options n’ont pas été épuisées. Je veux qu’ils me voient chercher toujours un dénouement dans la négociation et qu’ils se sentent libres de proposer des compromis.

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Je veux que la non-violence soit évidente pour eux et que nous cherchions toujours, ensemble, des solutions alternatives à la violence, y compris et surtout dans les moments où cela les concerne concrètement. Je veux qu’ils puissent me rappeler à l’ordre quand je dépasse les bornes, y compris et surtout quand cela les concerne directement.

Je veux qu’ils soient convaincus que je les aime quels que soient leurs sentiments, leur motivations et leurs actes. Je veux qu’ils aient l’occasion d’être eux-mêmes, qu’ils se sentent acceptés tels qu’ils sont. Je veux qu’ils sachent qu’au fond d’eux-mêmes ils sont bons, qu’ils sont intelligents, qu’ils font partie de la solution et non du problème.

Ce sont des actions qui passeront inaperçues au quotidien, noyées dans le flot de nos vies. Mais c’est un militantisme du quotidien. Un militantisme essentiel.

J’ai quatre enfants. Si je fais les choses bien, ça fera quatre personnes de plus qui auront eu l’exemple de la bienveillance, de la tolérance, de la non-violence. Qui sauront que c’est possible, que c’est important.

Qui, avec un peu de chance, croiront peut-être même que c’est tout à fait évident.

Et j’aurai changé le monde, à mon tout petit niveau.