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Un enfant tant désiré : mon interminable parcours en PMA

Abonnée au coaching de Mademoiselle Dentelle, je reçois un mail m'informant de l'existence de deux autres blogs, celui-ci et Sous Notre Toit. En raison de mon parcours, dont je vais te parler un peu plus bas, tout ce qui touche à la famille m'est devenu un peu douloureux à suivre et à lire. Alors au départ, je me dis que ce n'est pas pour moi. Puis, de nature curieuse, je file jeter un petit coup d'œil quand même. C'est alors qu'un article de Mme Creamy m'interpelle et me donne, à moi aussi, envie de témoigner à l'aube de cette ultime étape…

Je vais y revenir, mais avant : un petit flash-back.

Depuis de très longues années, je suis animée par une passion : j'adore les enfants. Déjà enfant, j'attirais les enfants, un vrai aimant ! Je jouais à la maman ou à la maîtresse avec eux. En CM1/CM2, pendant la récréation, je me souviens que je m'occupais des plus petits et leur proposais des activités. En grandissant, ça n'a pas changé, bien au contraire. Dès l'âge de treize ans, j'ai commencé à faire du baby-sitting, le weekend, pendant les vacances scolaires et le mercredi après-midi, jusqu'à mes 20 ans.

Et encore aujourd'hui, je garde souvent les enfants de mes amis. Dès que j'entre dans une pièce où se trouvent des enfants, un sourire, et les voilà collés à moi pour le reste de la journée. Un bébé pleure, personne n'arrive à le calmer, je le prends dans mes bras, et voilà qu'il cesse de pleurer et fait même des sourires. Je n'arrive pas à expliquer ceci… mais j'adore les enfants !

Pour tout te dire, même si mon rêve était de devenir maîtresse d'école, je travaille aujourd'hui dans un établissement de Protection de l'Enfance. Donc oui, les enfants, c'est toute ma vie. Mes neveux et nièces adorent venir à la maison et passer du temps avec moi. Le filleul de mon futur mari m'a encore dit tout récemment que j'étais la tata la plus génial du monde (gniiiiii !)…

Évidemment, vu mon attrait pour les enfants, tu te doutes que depuis mon plus jeune âge, mon vœu le plus cher est de devenir à mon tour Maman… Mais c'est là que ça se complique.

Avec mon futur mari, avant de décider d'avoir notre premier enfant, nous voulions avoir une stabilité familiale et financière. C'était impossible pour moi, malgré mon intense désir, de donner naissance à un enfant alors que toutes les conditions matérielles n'étaient pas réunies (appartement/maison, CDI, situation financière stable…).

Les essais débutent

Dès que celles-ci ont été réunies, au premier semestre 2010, nous avons décidé que c'était le moment. J'avais déjà arrêté ma pilule depuis presque un an en raison de fortes migraines qui me gâchaient la vie. J'imaginais donc tomber enceinte plutôt rapidement, bien que déjà à cette époque, j'avais ce fichu pressentiment…

Nous voilà donc partis pour les essai bébé. 6 mois se passent, toujours rien… Puis en janvier 2011, je pense être enceinte sans en être sûre. J'avais déjà fait deux tests pendant ces 6 mois (mes cycles durent en moyenne de 40 à 50 jours), alors je ne voulais pas être encore déçue… donc, j'attends.

Un soir, en rentrant du travail, je suis prise d'horribles douleurs qui m'obligent à m'arrêter le long de la route. Habillée en blanc, je remarque tout de suite que je perds du sang. Je rentre tant bien que mal chez moi. Dès le lendemain, après une nuit horrible et plus aucun signe d'une éventuelle , j'appelle ma gynécologue qui ne peut me recevoir avant deux semaines.

Lors de ce rendez-vous, je lui explique ce qu'il s'est passé. Elle me dit à demi-mots qu'il peut s'agir d'une précoce, sans en être certaine. Elle me prescrit du Duphaston et du Provames afin de réguler mes cycles, et me demande de prendre ma température chaque matin. Deux mois passent, je n'en peux plus de me lever chaque matin, samedis et dimanches compris, pour pendre cette fichue température ! Je retourne donc la voir avec ce mauvais pressentiment, qui n'a jamais été aussi fort qu'à ce moment-là. Je prends littéralement ma gynéco en otage, et lui demande de nous prescrire à tous les deux des examens complets, sans quoi je ne sortirais pas de son bureau ! Là, tu dois te dire que je suis folle, tu as sûrement raison… en tout, je suis très déterminée comme fille.

Un mois plus tard, le diagnostic tombe : mon futur mari a une OATS sévère (pour faire vite, ses « têtards » ne vivent pas assez longtemps et présentent des anomalies), et moi je suis diagnostiquée OPK (ovaires polykystiques). Nous sommes dévastés… D'autant plus que d'emblée, ma gynéco nous fait comprendre que nous avons plus de chance de gagner au loto que d'avoir un enfant naturellement. Il faudra nécessairement passer par une FIV ICSI (micro injection).

le temps qui passe - envie d'enfant et PMA

Crédits photo (creative commons) : Lauren Hammond

En avant pour la

Nous prenons rendez-vous avec le Service de Procréation Médicalement Assistée du CHU de notre département. Après tous les protocoles d'usage et plus de 6 mois d'attente encore, nous entamons notre première tentative de FIV en avril 2012, interrompue précipitamment car mon corps ne répond pas aux traitements… Première grosse déception, moi qui attendait avec impatience ce premier essai ! En plus, à cette période, les naissances pleuvent tout autour de moi, mes amies, mes collègues, mes cousines et cousins.

Combatifs, nous décidons de reprendre aussitôt les traitements, mais mon corps est long à se réveiller, et ça repousse notre seconde tentative à septembre 2012… En même temps que ma meilleure amie, qui elle est à sa dernière tentative. Le traitement m'épuise beaucoup et me fait prendre pas moins de 10 kg.

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Ça tombe pendant nos vacances, que nous passons, malgré nous, à la maison. Je me dis à ce moment que c'est un maigre sacrifice pour devenir ENFIN Maman. Après la ponction, on me replace deux embryons qui sont, d'après les médecins, de très bonne qualité. À la mi-octobre, la prise de sang est négative. J'ai beaucoup de mal à digérer cet échec, d'autant que je suis très fatiguée et affaiblie par les traitements.

Je me renferme sur moi-même. Les mois qui suivent ne sont que colère, dégoût et jalousie. Je ne peux plus voir une femme enceinte ou un nouveau-né en peinture. Même mon couple commence à battre de l'aile, je suis agressive et cherche le conflit sans même m'en apercevoir. Depuis, j'ai pris beaucoup de recul face à tout ça…

La nouvelle année, symbole de nouveau départ, me pousse à recontacter le centre de PMA. Je me sens prête et je me suis remise de l'étape précédente. En avril 2013, nous commençons donc une nouvelle tentative. Je me sens anormalement bien, comme dans une bulle, pendant toute la durée du traitement. Des signes ou des évènements particuliers (mon futur mari qui s'évanouit le jour du replacement) me font penser que cette fois-ci ce sera la bonne.

Deux semaines après le replacement, à deux jours de la prise de sang, j'apprends que ma grand-mère maternelle dont j'étais vraiment très proche, est décédée après avoir fait un AVC dans la nuit. Ma famille maternelle habitant à plus de 500km de chez moi, nous décidons avec ma maman de partir les rejoindre.

Ce jour-là, en arrivant chez ma marraine qui nous héberge durant notre séjour, j'apprends que je suis enceinte. Même si je suis heureuse, je n'arrive pas à me réjouir. Mon conjoint, qui n'a pas pu venir, est loin de moi et c'est bien un triste moment pour savourer cette formidable nouvelle. J'attends un ou deux enfants (deux embryons ont été replacés), et ma grand-mère n'est pas là pour partager ça.

Je ne me sens pas très bien et pas seulement à cause du décès de ma grand-mère, je sens que quelque chose ne tourne pas rond, ce pressentiment qui revient… j'ai beaucoup de mal à dormir pendant toute cette semaine que je passe dans ma famille.

Durant mon séjour, j'effectue 3 prises de sang, mon taux augmente légèrement, mais ma sage-femme m'explique qu'il est encore faible, il faut donc être prudent et réservé. Je suis enceinte de 4 semaines au moment de mon retour en Normandie. Je rendre chez moi, épuisée, et je vais me coucher à 17h. Vers 3h du matin, je me réveille angoissée comme jamais. Je constate que je perds du sang. Inquiète, je réveille mon futur mari et nous partons aux urgences. Je passe ma première échographie, mais c'est encore un peu juste pour voir quelque chose. Je fais une nouvelle prise de sang. On me demande de rentrer chez moi afin de dormir un peu. On m'appellera vers 9h00 pour me donner les résultats…

Appel des urgences : mon taux continu de grimper, tout va bien. Le médecin m'explique que des pertes de sang sont normales en début de grossesse et essaye de me rassurer. Je tente de me détendre, mais rien à faire, mon angoisse augmente à mesure des heures et des jours et mon mauvais pressentiment aussi. Sans suivent alors deux semaines interminables d'allers-retours aux urgences, des prises de sang, des pleurs, des nuits blanches, pour que finalement le mot fausse-couche soit prononcé et qu'il n'y ait plus d'espoir.

Comme si ça ne suffisait pas, on m'appelle un mois, quasiment jours pour jours, après le décès de ma grand-mère, pour m'annoncer la mort de mon grand-père paternel. Je pars une semaine dans l'Aisne pour aider mes parents à s'occuper de tout. Je suis anéantie, je deviens presque un robot. Je me plonge dans les démarches administratives pour oublier ma peine. Je te passe les détails de cette semaine catastrophique avec mes parents, mais ça a malgré tout contribué à la dégradation de mon état…

Essayer de remonter la pente… et tomber encore plus.

Je ne suis que vide durant plusieurs semaines. À cette même période s'enchaine les galères (un compromis d'achat immobilier annulé, des galères financières et j'en passe). Rien ne va plus dans mon couple, j'envisage de tout lâcher tellement je suis au plus bas (appartement, conjoint, boulot), et de m'enfuir loin, très loin.

Ce qui me dévaste le plus, c'est le silence autour de moi, ces non-dits. Personne ne me parle de ce qui vient de se passer, c'est devenu tabou (et ça l'est encore aujourd'hui !). Dès que j'aborde le sujet, ma famille et certains de mes amis changent de sujet, ou font comme s'ils n'avaient pas entendu… On me dit que ce n'est rien, que si ça a fonctionné une fois, ça marchera la prochaine fois, que c'est un mal pour un bien… Personne ne comprend ma peine, je ne me sens à place nulle part. (À cette époque, je n'ai pas encore découvert les blogs et les réseaux sociaux, qui m'aideront bien par la suite.)

Je deviens comme une étrangère pour mon futur mari. Je ne supporte plus les réflexions des gens, les conversations sur le sujet de la famille. J'ai même beaucoup de mal à m'approcher d'enfants, alors que c'est toute ma vie. Je décide de consulter une psychologue, mais ça ne passe pas bien, alors je laisse tomber.

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En janvier 2014, je pense que je vais mieux (oui je pense, car en fait pas du tout), et je décide de reprendre mes traitements et d'aborder cette 4ème tentative, même si mon conjoint n'est pas totalement prêt. Les hormones combinés à mon état presque dépressif me conduisent à me renfermer encore plus. Je deviens superstitieuse et je n'ose parler de cette tentative à personne. Je suis très angoissée, car nous sommes à un an jour pour jour de notre dernière tentative et de ma fausse-couche.

Je me renferme encore plus : d'habitude très joyeuse et pipelette (tu as dû remarquer vu mon récit), je ne parle plus. Et comme en plus j'ai arrêté de fumer depuis deux mois, je ne fréquente plus du tout le lieu de pause. Mes collègues de travail s'en aperçoivent, mais au lieu de venir m'en parler, elles pensent que mon silence est dirigé contre elles et commencent à me tourner le dos, alors que je n'ai besoin que d'un peu de compréhension et de chaleur humaine pour tourner cette page. Je suis très stressée, mais je ne dis rien.

La veille de ma ponction, une collègue m'incendie par texto alors que je suis en formation. Je m'effondre, j'ai beau lui expliquer que je ne vais pas bien et que cette tentative me stresse au plus haut point, elle ne comprend pas et continue ses propos plus que virulents. Je rentre chez moi abattue, en larmes, effondrée. Mon conjoint me ramasse à la petite cuillère.

Après une nuit blanche, direction le bloc opératoire pour la ponction. Après quoi, je me réveille en pleine crise d'angoisse : l'infirmière anesthésiste est contrainte d'appeler une psychologue. Je te passe les détails, mais évidemment cette tentative est un nouvel échec, malgré les trois beaux embryons replacés avec éclosion assistée.

Je ne veux pas reprendre le travail, mais je n'ai pas le choix. Je n'ai pas un fort caractère de nature, et il s'est encore amoindri à force d'échecs : j'ai donc un peu de mal à m'affirmer, surtout face à des personnes qui ont un certain aplomb. Alors évidemment, mon retour au travail est particulier. J'en veux énormément à ma collègue qui fait comme si tout était normal, aucune excuse, tandis qu'une autre de mes collègues lui fait part de son incompréhension face à tant d'agressivité, que ce genre de comportement était inadmissible. À part ma chère collègue M., personne n'aborde le sujet.

À travers ce témoignage, je veux aussi la remercier du plus profond de mon cœur d'avoir toujours été là pour moi. Plus qu'une amie, une sœur ou une mère, elle m'a toujours épaulée et réconfortée dans les moments les plus difficiles. Et si aujourd'hui, je suis redevenue la personne que j'étais, c'est grâce à elle.

À ce moment-là, je suis vraiment au plus mal et sur le point de faire une grosse bêtise. Je décide de consulter en urgence le CMP de ma ville. Les délais étant très longs, je reprends contact avec la nouvelle psychologue du CHU.

Où en suis-je aujourd'hui ?

Depuis, je vais beaucoup mieux. J'appréhende les choses différemment, et j'ai appris à me protéger. Mon conjoint a été là pendant toute cette période et ça nous a rapprochés (si tu lis cette page, sache que je t'aime). Même si ça me fait encore du mal que mes amies, ma famille ou mes collègues ignorent délibérément ma souffrance, j'ai appris à faire avec et à m'en détacher.

Je me suis rendue compte qu'à part le bébé, plus rien ne comptait à mes yeux. Nous ne sortions plus, je ne voulais entreprendre aucun autre projet. Pourtant, la vie continue et afin d'avancer, il est important de continuer à vivre.

Mais tu dois te demander pourquoi je te parle de tout ça maintenant ? Même si je vais mieux, je sais que c'est encore fragile. Nous envisageons d'aborder notre dernière tentative FIV pendant ce 1er semestre 2015. Cette ultime tentative me fait peur, j'ai peur de l'échec et de l'après. Et si nous ne devenons jamais parents ? C'est d'autant plus inquiétant qu'en octobre, on m'a diagnostiqué une endométriose.

Avant de me lancer à nouveau, je crois que j'avais besoin d'évacuer ma douleur et ma souffrance, et d'ainsi tourner une page. Quoi de mieux que d'écrire ce que nous ressentons ? Plus jeune, je tenais un journal intime, qui m'a permis de nombreuses fois d'évacuer mes petits chagrins. Alors voilà, version immense, j'évacue mon gros chagrin et mon stress via cette page, comme si recevoir ce mail de Mademoiselle Dentelle avait été un signe.

Si j'ai un conseil à te donner si tu es ou seras amenée un jour à endurer de telles épreuves : il est impératif de te confier à quelqu'un, d'en parler et d'évacuer. Ce n'est pas bon de garder nos angoisses pour nous et refouler notre chagrin. Et surtout, ne jamais perdre espoir !

Pour terminer, je voudrais dire aussi, de par mon expérience, qu'il est important de savoir écouter une personne qui se retrouve dans un tel cas de figure. On n'imagine pas comme c'est dur d'en parler pour celles et ceux qui endurent ces épreuves, et de surmonter tout ça au quotidien. Parfois, juste un simple « ça va » fait un bien fou !

Et toi ? Tu as connu un pénible parcours de PMA ? Tu as l'impression que l'ambiance dans laquelle tu baignais a pu être néfaste ? Viens en discuter…

Toi aussi, tu veux témoigner ? C'est par ici !