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A la une / Récit d'accouchement

Mon premier accouchement, sans péridurale et dans l’eau

Je suis très portée sur le naturel/physiologique lorsqu'il s'agit de mes bébés, comme tu as peut-être pu te rendre compte au fil de mes précédents articles. Même si je ne suis franchement pas convaincue par les performances des médecins anglais, j'étais très contente de pouvoir accoucher en Angleterre pour leur vision beaucoup plus physiologique de l'accouchement qu'en France. Si tu veux plus d'infos sur les différentes façons d'accoucher en Angleterre, tu peux aller lire mon article ici. Aujourd'hui, finie la théorie : je vais te raconter mon premier accouchement !

Mes derniers jours de

Je travaille de chez moi (et j'ai eu une grossesse très cool), ce qui m'a permis de me mettre en congé seulement deux semaines avant ma date prévue d'accouchement. Je me suis bien reposée la première semaine, mais au début de la semaine suivante, je commence un peu à m'ennuyer. Tout est déjà prêt pour l'arrivée de Peluche, il ne me reste plus qu'à accoucher. Le vendredi 11 décembre (nous sommes en 2015), j'ai mon dernier rendez-vous avec la sage-femme, le rendez-vous des 40SA. Mon terme est le lendemain, le samedi 12 décembre. Elle prend ma tension, me demande si tout va bien, et me propose un décollement de membranes, en m'informant qu'a ce terme de la grossesse, et si mon col est favorable (ramolli et un peu ouvert), il y a 50% de chances que le travail se mette en route dans les 48h. Comme je veux absolument éviter d'accoucher trop près de Noel, j'accepte le décollement. Ça fait MAL ! Heureusement que ça ne dure que quelques minutes ! Ca me stresse quand même un peu par rapport aux contractions, parce que si j'ai si mal alors qu'elle a juste gratouillé mon col, qu'est-ce que je vais faire quand ce sera une pastèque qui voudra sortir ?! Elle me rassure en me disant que ça ne sera pas le même type de douleur, et me conseille de marcher beaucoup pour accentuer l'effet du décollement.

Le lendemain, nous partons vers 11h au centre commercial pour faire une longue balade. Je contracte régulièrement, mais ça ne me change pas trop de d'habitude vu que ça fait 2 mois que j'ai de nombreuses contractions quand je marche. On mange au restaurant le midi, en se disant que c'est peut-être la dernière fois qu'on est que tous les deux ! Quand je me lève à la fin du repas, le serveur me demande si c'est pour bientôt, et nous éclatons de rire en voyant sa tête quand je lui réponds « hé bien en fait c'est pour aujourd'hui » ! Nous marchons encore deux bonnes heures puis nous rentrons à la maison, toujours à pied. Le centre commercial est en bas, et nous habitons en haut de la colline. Je galère à marcher et j'espère que ça a un impact sur mon col !

Apres le diner, et comme tous les vendredis soir, je tricote dans le canapé pendant que mon mari joue à l'ordi avec ses copains. Vers 20h, je me rends compte que je contracte encore, alors que je suis assise confortablement. Pleine d'espoir, j'attrape un bloc-notes et un stylo, et je note l'heure de la contraction. Puis de la suivante. Et de la suivante. Et encore de la suivante. Bon. Une heure vient de s'écouler, j'ai eu 6 contractions, une toutes les dix à quinze minutes. Je continue pendant une heure : 5 contractions, espacées de 10 minutes. Gniii, je crois que c'est parti ! Je préviens le mari, qui s'affole d'un coup : il court dans toute la maison, il monte et descend les escaliers, il ne sait plus où il est ni comment il s'appelle. Ça me fait rire ! Il finit par se poser et compte les contractions avec moi. Elles commencent à devenir plutôt désagréables d'ailleurs !

Crédits photo : Photo personnelle

Le début du travail

Vers 22h, on monte dans la chambre. Bêtement, je me dis que je vais me coucher pour me reposer un max entre les contractions. Entre 22h et 2h du matin, j'ai environ 10-12 contractions par heure, toutes les 6-7 minutes. On appelle la maison de naissance : il faut attendre que les contractions soient toutes les cinq minutes et durent une minute minimum. Or les miennes ne durent que 45 secondes. Suivant les conseils de la maternité, on redescend au salon et mon mari nous fait cuire des pâtes pour qu'on garde de l'énergie… mais je n'arrive pas à avaler quoique ce soit. On finit par remonter dans la chambre. Pour laisser mon mari dormir, on déménage mon matelas dans la chambre du bébé, où je passe environ une heure. Mais je n'arrive plus à gérer les contractions toute seule, alors on remet mon matelas dans notre chambre. Vers 5h du matin, mes contractions sont toujours au même rythme, mais elles sont devenues vraiment douloureuses. Mon mari rappelle la maison de naissance, mais elles nous disent que ce n'est toujours pas utile de venir. Vers 7h, je n'en peux plus, je ne sais pas quoi faire de ces contractions qui me font tellement mal mais dont le rythme ne change pas. On décide d'aller malgré tout à la maternité. Heureusement, c'est tout près de chez nous. J'attends que ma contraction passe avant de monter dans la voiture, et mon mari fonce à la maternité. Je descends de la voiture quelques secondes avant la contraction suivante. Ouf, j'ai échappé à la contraction dans la voiture !

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On s'installe dans une chambre et les sages-femmes de garde viennent se présenter. A 7h30, elles examinent mon col… Je suis à 3cm. Je fonds en larmes : toute cette douleur, pendant douze heures, pour rien ou presque ? Toujours aussi bêtement (parce qu'en fait, être allongée supprime l'effet de la gravité sur le col, donc ca n'aide pas à dilater…), je décide de me coucher, pour me reposer encore un peu, et je dors entre chaque contraction. A 9h, je décide de m'activer, je me dandine sur mon ballon, entre deux passages aux toilettes… Mes intestins ont décidé de faire place nette. J'ai encore en tête ce moment mémorable où j'ai du gérer une contraction assise sur les toilettes, c'est-à-dire pas du tout dans la position qui me permettait de gérer la douleur… Aie-euh ! Je vomis aussi, les sages-femmes me disent que c'est bon signe, le corps fait un maximum de place pour aider le bébé à avancer. Je demande à ce qu'elles vérifient où j'en suis, mais elles refusent : pour éviter les risques d'infection, elles ne regardent le col que toutes les quatre heures. Il me faut donc patiemment attendre 11h30… Et les minutes s'écoulent tellement lentement ! Mon mari a trouvé une bonne astuce pour m'aider à traverser les contractions : il me dit où j'en suis dans la contraction : « déjà un quart de fait », « déjà un tiers », « tu es à la moitié », « encore un quart »… Ça m'aide beaucoup !

Finalement, ça y est, c'est l'heure de la délivrance : il est 11h30 ! Les sages-femmes m'examinent et me disent « Bon, vous êtes a 5, voire 6 si on tire un peu… C'est bon, vous pouvez aller dans la baignoire ! » Mon mari me récupère en larmes, mais des larmes de joie cette fois-ci. Les 20 minutes de remplissage de la baignoire me paraissent être les minutes les plus longues de toute ma vie !

La fin du travail et la naissance

Nous sommes donc dimanche 13 décembre. Ca y est, 12h30, je suis dans la baignoire, et j'ai le sentiment que mon accouchement commence réellement. Je suis un peu désappointée, je m'étais dit que j'aurais beaucoup moins mal en étant dans l'eau, ce qui n'est pas le cas. Mais je garde le sourire, je plaisante avec la sage-femme et mon mari, qui est dans la baignoire avec moi. Au début, je suis assise, puis je ressens le besoin de changer de position et me mettre à genoux, les bras appuyés sur le bord de la baignoire. Les contractions sont toujours toutes les cinq minutes, mais elles durent maintenant deux minutes chacune, ça ne me laisse pas beaucoup de répit… Je ferme les yeux à chaque contraction, je suis dans ma bulle, mon mari ne peut plus me toucher. La sage-femme prend ma température et ma tension toutes les demi-heures, et écoute le cœur du bébé tous les quarts d'heures, pour vérifier que tout va bien. Vers 15h, elle me dit que si dans une demi-heure je n'ai pas encore commence à pousser, il faudra que je sorte de l'eau pour qu'elle puisse vérifier la dilatation. Je ne suis pas super emballée à cette idée… Un peu plus tard, la sage-femme fait remarquer à mon mari une tache violette au-dessus de mes fesses, et elle nous explique que c'est la tête qui s'est engagée qui crée un genre d'hématome a cet endroit. La naissance ne devrait plus tarder…

Un peu avant 15h30, sur une contraction, j'émets un genre de râle/grognement/bruit chelou qui sort des profondeurs de ma gorge. La sage-femme me dit «C'est le signe, préparez-vous, on ne va pas tarder à y aller ». Et effectivement, à la prochaine contraction, je sens que ca pousse. A ce moment, je suis à quatre pattes dans la baignoire, la tête appuyée contre la paroi. Une des sages-femmes me plie une serviette de toilette pour que je l'intercale entre mon front et la paroi, et je m'y accroche à chaque contraction. Je n'ai plus aucun répit : les contractions s'enchaînent comme des vagues de douleur intense qui montent et qui descendent. Je pousse quand j'en ressens le besoin, mais à chaque fois que la contraction se finit, je sens la tête de ma fille qui remonte. Je crie « Help me ! » et les sages-femmes m'encouragent en me disant que je m'en sors super bien et que ma fille sera bientôt née. L'une d'elle me dit « quand votre fille sera sortie, mettez-vous sur vos genoux que je puisse la passer entre vos jambes pour que vous puissiez la sortir de l'eau ». Je confonds genoux (« knees ») et orteils (« toes ») alors je crie à mon mari « Pas sur les orteils je n'y arriverai pas dis-leur pas sur les orteils ! », mais il me rassure immédiatement en me confirmant qu'il s'agit bien de me mettre sur les genoux… La sage-femme me propose de toucher la tête de mon bébé : c'est très bizarre comme sensation de mettre ses doigts dans son vagin et de rencontrer un truc à 3cm de la sortie !

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Encore une contraction, je pousse de toutes mes forces : j'entends la sage-femme dire « la tête et une main sont sorties ! ». A peine le temps d'essayer de me représenter comment une main pourrait être sortie que la contraction suivante arrive : je pousse et je sens un immense truc sortir de moi, avec une douleur qui ressemble plutôt à une brûlure ou une coupure et qui me fait pousser un cri. Je me mets sur mes genoux, et j'attrape ma fille entre mes jambes. Je la remonte à la surface de l'eau… Ca y est, ma fille est née, je suis maman, nous sommes parents. C'est une émotion indescriptible : le soulagement de la fin des contractions, le désarroi d'entendre ma fille pleurer et de ne pas réussir à la consoler, la peur de cette nouvelle responsabilité… Mais par contre, je n'ai pas eu cette bouffée d'amour fou comme certaines peuvent ressentir.

Crédits photo : Photo personnelle

La délivrance et l'après

Apres quelques minutes, le cordon ne bat plus, et mon mari le coupe. Mon mari prend Peluche pour l'enrouler dans une couverture et faire les premiers tests. Quant à moi, je sors de la baignoire pour aller expulser le placenta au sec. Une petite injection d'ocytocine et chlouf, mon placenta glisse hors de moi. Je n'ai même pas eu de contractions pour ça, ouf ! La sage-femme vérifie que le placenta est complet, et je demande des gants pour pouvoir l'examiner moi aussi. Mon mari me dira plus tard qu'il a songé à s'enfuir en courant avec Peluche en me voyant faire ça ! Puis la sage-femme m'examine et me dit que j'ai une petite coupure sur la lèvre intérieure – d'où cette sensation de brûlure quand Peluche est née, car comme elle avait un bras plié (et la main au niveau du cou), ça a trop étiré les tissus. Elle me propose un point de suture mais je n'ai pas du tout envie d'avoir encore mal, alors je me dis que ça cicatrisera tout seul ! Le personnel quitte la chambre et nous laisse tous les trois. On envoie des texto à la famille et aux amis. On fait notre première photo de famille.

Pendant que je mets Peluche au sein pour sa tétée de bienvenue, mon mari part nous chercher à manger. Quand il revient, on nous propose de changer de chambre : en effet, nous sommes dans la chambre avec la baignoire, et nous devons la libérer au cas où une autre parturiente arrive.

Je marche jusqu'à la chambre, j'ai les jambes en coton et je marche tout doucement, c'est bizarre ! En arrivant dans la chambre, j'ai du mal à respirer, et je n'arrive pas à manger. J'ai comme un poids sur la poitrine. J'en parle à la sage-femme, qui me dit de la tenir au courant si la sensation est toujours présente d'ici une demi-heure. Oui, je la ressens toujours : c'est le branle-bas de combat. La sage-femme a peur que j'ai un caillot dans les poumons, alors je dois être transférée pour en savoir plus. Oui, mais transférée ou ? Mon accouchement de rêve se transforme en flou mal organisé : je ne peux pas rester dans l'hôpital ici, car ils n'ont pas de vraie maternité, mais le grand hôpital de la région ne veut pas m'accepter car il faudrait m'emmener au service cardio alors que mon bébé n'a pas été déchargé par un pédiatre. Je reste deux heures couchée sur le brancard dans l'ambulance, à attendre qu'ils finissent par décider où m'emmener. Mon mari était parti en avance à l'hôpital (pas de place dans l'ambulance), je finis par lui téléphoner et lui demander de revenir puisque je ne suis pas encore partie… Finalement au bout d'un moment, et après m'avoir fait un électrocardiogramme, on décide de m'emmener aux urgences obstétricales. Je passe la nuit dans une chambre et on vient prendre ma tension toutes les heures. Tout ça pour ça, j'aurais pu rester à la maison de naissance… Vers 8h du matin, puisque tout va bien – je n'ai plus cette douleur à la poitrine depuis que la sage-femme m'a dit « Ça pourrait être un caillot dans les poumons, c'est fatal mais ne vous inquiétez pas, je suis sure que ce n'est pas ça »  – on me monte en chambre, comme une jeune accouchée normale. La pédiatre qui devait venir décharger Peluche à 10h viendra finalement à 17h… Une fois le papier signé, mon mari va chercher le siège auto. On harnache Peluche dedans et on rentre à la maison. Au moment de passer le seuil de la porte, on se regarde et on fond en larmes : notre vie a trois commence officiellement maintenant !

C'était un article vraiment long, et j'ai pleuré plusieurs fois d'émotion en l'écrivant. J'espère que ça te plaira de lire mon expérience. Et au sujet de cette douleur à la poitrine : en fait, c'était « juste » une crise d'angoisse due à cette responsabilité incommensurable qui venait de me tomber dessus… Donc rien de grave, ouf !