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A la une / Récit d'accouchement

Mes deux accouchements sans péridurale : le bilan

Il y a bientôt 3 ans (han mon dieu, ma fille va avoir 3 ans !), je t’ai parlé de mon premier accouchement pendant lequel la péridurale m’est passée sous le nez et, plus récemment, je t’ai expliqué en long et en large ma seconde expérience sans péridurale, volontaire cette fois-ci.

On lit absolument partout sur Internet des témoignages d’accouchements physiologiques, encore plus de récits de futures mamans qui expliquent vouloir « tenter le sans péridurale » (coucou, j’en fais partie) et de discours soit survivalistes de type « j’ai réussi », soit de regrets de n’avoir pas su aller « jusqu’au bout » pour diverses raisons. Tout ça, j’ai lu, lu et relu. En revanche, ce qu’on lit beaucoup moins (je trouve mais si tu en connais, envoie !), c’est le bilan de mamans ayant accouché sans péridurale… et qui peut-être ne feraient pas le même choix une deuxième fois.

Je voudrais donc revenir avec toi sur ces deux expériences et tirer un bilan, que j’appellerai donc mitigé.

Un contexte plus global

Déjà, il me semble que l’accouchement physiologique est devenu très à la mode.

Cela s’inscrit évidemment dans un processus plus global de nos sociétés occidentales de retour vers plus de naturel, plus de simplicité. On a peut-être « trop » médicalisé l’accouchement qui, pour certaines femmes, se passerait très bien naturellement. De manière très pragmatique, et pour ces femmes-là uniquement j’entends, a-t-on vraiment besoin de « tout ce bazar » pour accoucher quand on sait très bien le faire toute seule ?

Crédits photo (creative commons) : mohamed_hassan

Après tout, hors condition médicale spécifique, tout le monde peut fondamentalement accoucher sans péridurale, c’est un fait. Bah oui, avant la péridurale … il n’y avait pas de péridurale et on accouchait quand même ! Logique imparable. Mais ce n’est pas parce qu’on pourrait le faire qu’on devrait le faire, je pense que tu es d’accord avec moi ? Je reste ainsi à 300.000% convaincue de l’avancée incroyable que représente l’accouchement sans douleur : pourquoi souffrir quand on a une anesthésie à disposition ! On aurait tort de se priver.

Ce que je reproche vraiment à cette mouvance « pro-nature », c’est d’avoir causé une sorte de hiérarchie de l’accouchement, avec le physiologique au sommet tel un Graal à atteindre. En découle parfois un sentiment de culpabilité chez les mamans qui voulaient initialement faire sans péridurale mais changent d’avis en cours de route. Je ne supporte pas cette façon d’envisager les choses car cela laisse entendre à ces mamans qu’elles ont failli, qu’elles ont fait « moins bien » qu’une autre.

Il ne devrait pas y avoir de gradation dans la valorisation de nos accouchements.

Mais, quand on voit certaines réactions, on en est encore loin… Ce qui ne m’aide pas à envisager sereinement l’accouchement physiologique, je dois dire. Faire partie de cette caste de « mamans ultras » qui regardent les autres de haut, non merci.

Deux expériences, deux ressentis

Comme je l’ai déjà expliqué (trop souvent…), j’avais choisi la péridurale pour mon premier accouchement, sans jamais envisager d’autres scénarios. C’était une évidence pour moi. Trois ans plus tôt, une cousine m’avait expliqué souhaiter se passer de péridurale et je l’avais prise pour une folle ! Volontairement subir une des plus fortes douleurs au monde alors qu’on peut l’éviter mais ça va pas, nan ?!

Et comme tu le sais, l’histoire m’a donné tort… Pas le temps de se poser la question quand on dilate de 3 à 10 cm en 1h30, sans prévenir. J’ai donc fait une croix sur la péridurale (ou bien la péridurale a fait une croix sur moi hmm)… et je me suis rendue compte que ça n’avait pas été « si » terrible que ça, en fait. Et ma foi, même que je pourrais envisager de refaire sans si on avait un deuxième. Ni une, ni deux, je me suis donc lancée dans cette folle aventure une deuxième fois, sauf que j’y suis arrivée préparée à bloc.

J’ai suivi une préparation à l’accouchement spécifique avec une sage-femme, j’ai beaucoup lu sur différentes techniques (Gasquet, Isabelle Brabant, etc.), j’ai acheté du matériel ad hoc… Je suis arrivée à cet accouchement en me sentant relativement rassurée, préparée et prête autant qu’on peut l’être. A moins d’un problème médical inopiné, toutes les chances étaient donc de mon côté. L’histoire m’a cette fois donné raison et tout s’est déroulé selon mes prévisions : j’ai accouché de mon fils sans péridurale.

D’habitude, je lis des témoignages qui vantent la victoire, la résilience, la résistance de la maman, les multiples bénéfices de l’accouchement physiologique ou le sentiment d’avoir passé un cap symbolique en se passant de péridurale. Je n’ai trouvé presque que cela sur Internet. Or, tu sais ce que j’ai retenu de mon deuxième accouchement sans péridurale ?

J’ai eu l’impression de me noyer dans la douleur.

Le ressenti n’a pas du tout été le même entre mon premier et mon deuxième accouchement. Ca a du sens car je n’y étais pas préparée de la même manière. On m’avait d’ailleurs dit « si tu es préparée, ça se passera mieux » ou bien « quand on sait qu’on n’aura pas de péridurale, on sait où on va et c’est plus facile à vivre ». Quelle blague ! Moi, je te dirais surtout que quand on sait qu’on n’aura pas d’anti-douleur, on sait que la douleur va être totale, jusqu’au bout, qu’on n’aura pas de répit. D’autant plus quand c’est le deuxième et qu’on connaît déjà les sensations, on sait qu’on sera seule face à cette incroyable douleur qui te prend dans la moindre fibre de ton être. On sait qu’il n’y a pas d’échappatoire possible. Pendant mon accouchement, je me suis donc sentie bien plus stressée à l’idée de la souffrance présente et à venir, alors même que je savais effectivement mieux la gérer et que j’avais plus de moyens à ma disposition.

Bien sûr, ce n’est que mon ressenti et beaucoup de femmes ne le vivent pas comme ça. Mais je veux montrer que cela peut aussi arriver. Soyons claires, je ne regrette pas pour autant d’avoir accouché sans péridurale et je suis fière de moi, contente d’avoir tenu mon petit challenge avec moi-même. Cela ne m’empêche pas de considérer d’un mauvais oeil ces sensations ressenties.

Le referais-je encore ?

La grande question, dans l’hypothèse fantaisiste et statistiquement improbable d’un troisième enfant, revient après ce deuxième accouchement en demi-teinte : le referais-je ?

La réponse tend vers le « non » mais il n’est pas catégorique.

Je l’ai déjà dit, j’ai un besoin viscéral d’offrir la même chose à tous mes enfants. Concrètement, cela passe par un accouchement identique autant que possible car je vivrais assez mal de soumettre un de mes enfants à une péridurale si les autres n’en ont pas eu. A côté de ça, je n’ai pas aussi bien vécu le sans péridurale volontaire qu’espéré et je ne tiens pas spécialement à me infliger ça de nouveau. Par ailleurs, il me reste un fond de curiosité intellectuelle qui me fait dire que, quand même, j’aimerais bien savoir ce que ça fait d’avoir une péridurale !

Heureusement, j’espère ne plus devoir me poser sérieusement la question… J’espère aussi n’avoir découragé personne. Cela reste après tout une décision profondément personnelle.

Et toi, as-tu eu un accouchement sans péridurale ? Comment l’as-tu vécu ? Après m’avoir lue, voudrais-tu encore le tenter ?