Nous sommes à quelques jours des premières vacances scolaires et hier, une belle surprise m’attendait dans le cartable des enfants. Les fameuses photos scolaires. Je les attendais avec impatience ces photos. C’est difficile d’avoir une belle photo d’eux alors c’est l’occasion, tu connais surement ça si tu as des enfants scolarisés. J’ouvre la pochette de mon fils, sans surprise et en toute impartialité, il est beau comme tout. Une belle pose, son superbe sourire et ses yeux pétillants en croissant de lune. Je fonds, évidemment. Et puis j’ouvre la pochette de sa petite soeur.
Pour rappel, Clémentine a presque 3 ans et vient d’entrer en petite section de maternelle.
Comment te décrire cette photo… Tu te souviens quand tu es revenu de ces supers vacances et que le lundi matin tu as repris le chemin du bureau en te demandant quand tu vas avoir le courage de claquer la porte ? Voilà, c’est la même tête. La photo de classe ? 15 gamins avec un grand sourire sur leur visage et ma fille, premier rang, au milieu, aussi agréable qu’une porte de prison.
J’étais tellement déçue de ses photos. Je suis le genre de maman à prendre toute la pochette de photo, même si je n utilise que le quart, et à les ranger soigneusement dans un album dédié. Mon fils a le sien, évidemment ma fille aura son album également. Mais voilà, ma première réaction, ça a été la déception. Et puis j’ai montré les photos à son papa.
Pour te situer un peu, le père de ma fille c’est à peu près ça :
Photo (creative commons) : Free-Photos
Du coup, quand il a vu les photos, sa réaction a été : » Ben elle est jolie comme tout ! » Quand je lui ai fait part de mon sentiment il n’a pas compris. « Pourquoi veux tu qu’elle fasse semblant de sourire alors que tu sais très bien que tout ça, c’est pas son truc à elle ? » ( Bon en vrai, c’était moins élégant quand c’est sorti de sa bouche).
Fidèle à elle même.
Et il avait raison ( ne lui dis pas que j’ai dit ça , il a déjà trop tendance à le penser ! ). Clémentine depuis sa naissance n’est pas comme les autres enfants. Ce n’est pas le genre d’enfant à transpirer la joie de vivre par tout les pores de sa peau. Elle fronce plus souvent les sourcils qu’elle n’a les yeux pétillants. Elle ne sourit pas à tout va. Elle a mis un an et demi à décrocher son premier sourire à ses taties et grands parents. Ils sont peu à avoir obtenu câlins et bisous sans la supplier pendant 3h. Elle est comme ça.
A la maison, c’est différent. Elle chante sans arrêt, elle danse, elle rit aux éclats avec son frère ou son père ( d’ailleurs elle sourit sur la photo scolaire qu’elle partage avec son frère! ) Elle me fait des bisous bien baveux comme elle dit et des câlins qui m’étouffe. Mais elle n’est pas à l’aise avec les autres. Et elle ne fait pas semblant. Elle reste fidèle à elle même en toutes circonstances. Parfois avec moi elle dépose les armes » bon d’accord Maman ». Mais c’est très rare.
Il y a quelques semaines, alors que nous étions en promenade sur une brocante elle m’a dit très naturellement » Maman, ils me fatiguent les gens « . Voilà, c’est ma fille. Alors son papa, à qui elle ressemble énormément, tant par le physique que par le caractère se reconnait beaucoup en elle et se sent plutôt rassuré dans le sens qu’elle ne cherche pas à être aimée à tout prix des autres , quitte à ne plus être elle même. Elle ne se laisse pas faire, elle n’est pas influençable et ça lui convient. Bien sûr, je suis d’accord, c’est important qu’elle reste fidèle à elle même et qu’elle ait le caractère de l’assumer. Mais mon cœur de maman se serre quand même un peu.
Trop différente ?
J’ai peur pour elle. Peur qu’elle soit rejetée des autres, qu’elle n’arrive pas à s’intégrer. J’ai peur qu’elle se sente trop seule et trop différente des autres. Je sais que visiblement , c’est son choix à elle mais ce n’est pas pour autant toujours facile à vivre. Dans la famille de mon mari, même si ce n’est jamais dit méchamment, ma Clémentine est connue pour être « la pas fine ».
A l’école, une atsem m’a dit un matin : « Dites donc il va pleuvoir aujourd’hui, hier Clémentine m’a fait un sourire ! ». Ce matin encore , alors que j’attendais à la mairie et que j’avais vue sur la cour d’école, j’ai vu ma fille observer un groupe d’enfant sans les approcher. Elle a été parler aux atsems à un moment et je les ai vu singer son visage renfrogné. Je sais bien que ce n’est pas de la moquerie méchante mais ça m’a fait de la peine pour elle.
Clémentine n’est pas une petite fille désagréable, elle est adorable au contraire, mais elle décide de quand et avec qui l’être. Et ça, c’est difficile à concevoir pour son entourage . J’ai l’impression que pour eux une enfant de 3 ans devrait par nature être mignonne, souriante, agréable et pleine de vie.
Elle est souvent comparée à sa cousine qui souriait déjà alors qu’elle n’avait que quelques jours. Une petite fille toute gracieuse et super souriante. Clémentine n’est pas du tout comme ça.
Photo (creative commons) : martakoton
Pourquoi devrait elle être comme les autres ?
En quel honneur devrait elle lui ressembler ? On parle beaucoup de richesse dans la différence quand il s’agit d’adultes. On revendique même ce droit à la différence. Mais une petite fille de 3 ans qui ne sourit pas et ne suit pas la masse, on la montre du doigt, on lui reproche d’être comme elle est. Parfois même on rit d’elle. J’essaie de me dire qu’elle est trop petite pour remarquer tout ça mais je sais que c’est faux. Je sais que la façon dont on traite un enfant détermine l’adulte qu’il sera.
Alors parfois je sors les griffes et je deviens moi aussi une ourse mal léchée. On fait front avec son papa pour protéger notre petite puce. Après tout, nous ne sommes pas nous même des modèles de sociabilité. On est mieux chez nous qu’ailleurs, on a peu d’amis mais ceux qu’on a sont comme notre famille. On aime les nôtres mais on est bien loin d’eux aussi. On est de plus en plus blasé de l’humain. C’est peut être un peu notre faute si elle est comme elle est. Nous en tout cas, son frère , son papa et moi même, nous l’aimons comme elle est. Et jamais je ne la force à sourire, à faire un bisou ou un câlin si elle n’en a pas envie. J’ai parfois plus envie de distribuer des claques plutôt que des bises , je ne vais pas forcer ma fille à faire semblant. Elle décidera elle même du chemin qu’elle prendra. Et moi je serai toujours à ses côtés pour la soutenir et lui donner confiance et assurance si elle en a besoin.
Bon je te laisse, on va hiberner…
Photo (creative commons) : Jacama
Et toi , tu as remarqué que ton enfant a un caractère spécial ? Tu le revendiques ou au contraire tu crains qu’il n’en souffre ? Raconte-nous !