Ça fait maintenant plus de 7 ans que je suis avec Mr Bob (dont 9 mois de mariage). L’envie d’un bébé a commencé à pointer le bout de son nez il y a quelques temps. Au début, c’était plus pour embêter Mr Bob (ceci me permettant de lui rappeler que le mariage me ferait patienter…), mais ensuite, l’idée a mûri. Je me suis dit, pourquoi pas, bientôt…
Mais voilà, depuis mon adolescence, je suis persuadée que j’ai quelque chose de « cassé » à l’intérieur, qui m’empêchera un jour d’avoir des enfants. En cherchant un peu l’origine de cette peur, je me suis rappelée les multiples grossesses compliquées de ma maman, ainsi que les 3 enfants qu’elle a perdus tardivement.
J’aurais aimé pouvoir lui en parler, mais la vie en a fait autrement, elle est décédée lors de sa dernière grossesse, il y a bientôt 16 ans. Je n’avais donc toujours pas de réponse sur la cause réelle de ses problèmes. Du coup, tu comprendras que dans mon esprit, être enceinte est plus une source d’angoisse qu’un instant de bonheur. (Bien que je ne l’ai encore jamais vécu, et que je ne demande qu’à changer d’avis…)
Je suis restée plusieurs mois (années ?) à me poser la question, Monsieur Bob n’hésitant pas à me rassurer. J’ai commencé à en parler dans ma famille… Jusqu’au soir où la nouvelle est tombée, quand ma grand-mère m’a dit : « Lorsque tu voudras un enfant, tu diras au gynécologue que j’ai pris un médicament pendant la grossesse de ta maman, du Distilbène. ».
Là, j’ai compris que ce médicament que j’avais vu en cours d’écotoxicité, ce médicament dont j’avais plaint les familles touchés… ce médicament me concernait directement… Tout concordait enfin : les fausses couches tardives, les grossesses alitées, les décollements placentaires, etc. : ma maman était une fille DES. Mais alors qu’est-ce que ça faisait de moi ? Quelle répercussion cela allait-il avoir dans ma vie ?
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Le premier réflexe que j’ai eu est d’aller me renseigner sur Internet. Je suis alors tombée sur le site d’une association de victimes qui est très bien fait : DES France. J’y ai appris beaucoup de choses, dont voici un petit résumé.
Le DES est un médicament qui a été prescrit aux femmes enceintes entre les années 50 et 80, afin d’éviter les fausses couches. Les effets indésirables connus du DES touchent les femmes ayant pris ce médicament (cancer du sein par exemple), mais aussi et surtout les bébés ayant été exposés in utero, et particulièrement les filles.
Pour ces dernières, cela se caractérise notamment par des cancers, des malformations de l’appareil génital, des difficultés à avoir des enfants (grossesse extra-utérine, avortement spontané, prématurité…), voire l’infertilité. Il s’agit d’un des plus grands scandales sanitaires, qui n’a pas touché que la France. Toutefois, d’autres pays comme les Etats-Unis ont été plus réactifs, et ont retiré la molécule du marché presque 10 ans avant la France.
Tu l’auras remarqué, rien n’indique les répercussions sur la troisième génération, dont je fais partie. Il y a en effet eu très peu d’études, les filles concernées étant encore pour beaucoup trop jeunes pour devenir maman. J’ai donc dû partir en quête d’autres informations. Quoi de plus normal que de se tourner vers les professionnels de santé !
1. Rendez-vous chez le gynécologue
J’ai d’abord pris rendez-vous chez une gynécologue que l’on m’avait conseillée, mais que je n’avais jamais rencontrée.
Je lui expose les faits, et lui demande donc si je risque d’avoir des soucis. Et là, pour seule réponse : « OUI. ». Pas d’explications, rien ! Comme si c’était naturel d’annoncer ça et de poursuivre la consultation comme si de rien n’était…
Bref, gros coup de déprime. Et j’ai abandonné cette gynéco.
2. Rendez-vous chez mon médecin généraliste
Pour le coup, sa réponse m’a beaucoup plus plu… Il a pris son temps pour me dire qu’il ne voyait pas pourquoi je serais concernée, car d’après lui, il ne s’agissait pas d’une mutation génétique. Pour mon moral, j’ai préféré garder sa version. Version qui sera d’ailleurs confirmée par la suite par le médecin du travail et les infirmiers de la clinique dans laquelle je travaille… Ouf !
Les mois ont passé, je me suis satisfait de cette réponse, le projet bébé n’étant pas pour demain de toute façon. Et puis voilà, depuis septembre, je suis mariée avec Mr Bob, et même si on veut prendre notre temps, je sais que c’est pour bientôt. Les questions et incertitudes me sont donc revenues en tête. Cette fois, j’ai décidé de contacter directement l’association.
3. Contact avec l’association DES France
J’ai envoyé un mail en demandant s’ils avaient des témoignages ou récits de jeunes filles de la troisième génération, qui pourraient ma rassurer (ou non).
Leur réponse n’a pas tardé : 3 jours plus tard, une secrétaire m’écrivait pour me rassurer et m’informer que mon mail avait été transmis à un membre du conseil scientifique de l’association. J’allais enfin avoir une réponse d’une personne qualifiée sur ce médicament ! (Car il faut le dire, c’est un sujet un peu tabou, et peu de médecins connaissent vraiment les conséquences du DES.)
8 jours plus tard, j’ai reçu cette réponse tant attendue… J’étais très stressée avant de l’ouvrir.
Ces mots, je ne les oublierais pas. « […] Toutes les études concordent : il n’y a pas de retentissements en ce qui concerne l’infertilité et l’évolution des grossesses. Vous devez considérer que vous êtes tout à fait normale sur le plan gynécologique et, à l’avenir, pour vos grossesses. […] »
Merci à ce Professeur pour ces 5 lignes, qui me permettent d’aborder une future grossesse bien plus sereinement qu’à l’origine !
Voici donc un message d’espoir à toutes les jeunes filles qui pourraient être concernées, et qui se posent beaucoup de questions. Bien entendu, comme toute femme (même non exposée au DES), nous ne sommes à l’abri de rien. Mais nous ne connaîtrons sûrement pas le même calvaire que nos mamans. Nous pourrons certainement être heureuses d’être enceintes, et avoir une famille nombreuse pour celles qui le souhaitent.
D’ici la fin de l’année 2014, nous aurons sûrement de nouvelles informations. L’association DES France, avec d’autres partenaires, a en effet lancé une grande étude en 2013. Ils ont reçu en retour plus de 10 000 questionnaires utilisables. Cette mine d’or d’informations pourra sûrement nous en dire plus !
Je veille attentive pour l’arrivée des résultats. Si ça t’intéresse, je t’en ferai un petit retour… Et je ne manquerai pas aussi de te raconter mes futurs aventures d’essais bébé et de grossesse.
Et toi ? Ta mère ou ta grand-mère a pris du Distilbène pendant sa grossesse ? Tu t’inquiètes pour ta possibilité de devenir mère un jour ? As-tu trouvé des réponses à tes questions ? Tu as déjà été enceinte ? Comment ça s’est passé ? Viens en parler…
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Toi aussi, tu veux témoigner ? C’est par ici !