OK, JE SAIS. Taper un titre comme celui-là en espérant être lue, c’est comme penser que la plagiocéphalie est une déformation bien connue en dehors du cercle fermé des nouveaux parents (et encore).
Pourtant, je t’assure que ces articles peuvent être/sont intéressants, tout simplement parce que si un jour, tu t’y trouves confrontée, tu auras au moins un exemple sous la main pour te rassurer (ou pas). Et puis, moi, je suis curieuse de nature, et je vais partir du principe que c’est également ton cas (de toute façon, t’as ouvert l’article, c’est trop tard pour toi).
Tu m’excuseras, je ne suis pas ophtalmologue, ni médecin, donc j’essaierai de faire au plus simple. Cet article n’est pas un outil de diagnostic, mais bien une source d’informations générales et un témoignage (heureux).
Crédits photo (creative commons) : Ali Moradmand
L’anisocorie, petit condensé d’encyclopédie médicale
L’anisocorie, donc, ce trouble bien connu dont tu entends peut-être parler pour la première fois, est en fait une différence de taille entre les deux pupilles d’un individu. L’une des pupilles est donc plus petite ou plus grande que l’autre.
C’est un trouble ophtalmologique qui peut apparaître dès la naissance ou se développer avec l’âge. Dans tous les cas, il est impératif de consulter un médecin spécialiste des yeux, l’ophtalmologue, pour déterminer les causes éventuelles et aviser de la nécessité d’un suivi et/ou d’un traitement.
Petite précision lexicale : l’opticien est également un spécialiste de la vision, qui évalue le degré de correction nécessaire à une bonne vue et une bonne « hygiène de la vue », et fournit le matériel optique requis (lunettes, lentilles, etc.). Il n’est pas apte à poser un diagnostic médical, mais il peut t’orienter en la matière et faire de la prévention.
Je te parle de la nécessité de consulter un médecin sans faute car, en apparence inoffensive, l’anisocorie peut cacher des troubles neurologiques graves (par exemple, le syndrome de Guillain-Barré ou la maladie de Charcot), des hémorragies cérébrales, une méningite, voire des tumeurs au cerveau. Elle peut aussi apparaître suite à un choc, une infection, être un effet secondaire de médicament ou être dite « physiologique bénigne », c’est-à-dire n’avoir aucune cause particulière, ni aucun effet autre qu’une pupille plus « fainéante » que l’autre.
Parmi les indices permettant de reconnaître une anisocorie bénigne, il y a notamment le fait que la pupille réagit normalement à la lumière (c’est-à-dire qu’elle se contracte lorsqu’elle y est exposée) et que ses réflexes moteurs sont normaux (la pupille bouge normalement en réaction à divers stimuli).
Mais l’anisocorie est plus souvent un symptôme parmi d’autres d’une maladie ou d’une condition médicale qui peut s’avérer sérieuse. 17% seulement des anisocories sont physiologiques : il ne faut donc pas prendre ce trouble à la légère, surtout s’il arrive après la naissance !
Croquette et son anisocorie : le diagnostic
Je n’avais pas juste en tête une mission d’information et de service public avec cet article, tu t’en doutes. Si je t’en parle aujourd’hui, c’est aussi parce qu’on le vit avec Croquette depuis sa naissance. Je te rassure directement : elle fait bien partie des 17% de chanceux qui n’ont « qu’ » une anisocorie physiologique.
Nous avons mis une ou deux semaines à identifier ce trouble chez elle après sa naissance. Le temps, en réalité, qu’elle se décide à ouvrir ses yeux suffisamment fort et suffisamment longtemps pour qu’on puisse plonger notre regard dans le sien !
Au-delà de toute la perplexité du nourrisson et de la faim que nous pouvions lire dans ses yeux, nous avons également découvert cette fameuse pupille un peu plus grande que l’autre. À l’époque, elle était même franchement plus grande.
Mon mari, issu d’une longue lignée d’infirmiers et de soignants et vaguement familier avec ce trouble, en a directement référé à ses parents et au pédiatre, qui ont conseillé d’aller voir un ophtalmologue quand Croquette atteindrait 10 mois.
C’est donc ce que nous avons fait un beau jour de mars 2016. Bon, Croquette avait alors 11 mois : peu habitués aux rendez-vous à l’hôpital, on s’était loupés sur les délais d’attente, parents indignes que nous sommes. Notre ophtalmologue attitrée préférait en effet que nous fassions examiner notre fille par une de ses consœurs, spécialisée en « nyeux-nyeux d’enfant » (comme j’ai essayé d’expliquer à Croquette : résultat plus que mitigé, forcément).
Elle a été un vrai petit ange pendant les trois longues heures qu’ont duré la visite, alors que ça l’empêchait de faire sa sieste du matin, de manger son déjeuner à l’heure et que, pour être honnête, personne n’aime qu’on lui mette des gouttes dans l’œil et qu’on lui triture le minois aussi longtemps, dans un environnement rempli d’enfants hurlant à la cantonade leur dégoût des traitements médicaux.
D’ailleurs, je te parie mon goûter qu’on ne va pas rigoler quand on devra y repasser en mars 2017. Croquette a depuis lors développé une compétence fondamentale appelée « quand je ne veux pas, tu peux toujours courir », et je n’envie pas du tout le pauvre assistant qui devra l’approcher. Bon, elle ne mord pas (encore), c’est déjà ça. En plus, je serai enceinte de 8 mois, bref, ça va être l’éclate la plus totale !
Ce long examen de trois heures comportait donc toute une série de tests, durant lesquels l’œil a été soumis à divers stimuli (mécaniques, lumineux, visuels, etc.). On a fait plusieurs fonds d’œil pour observer… ben le fond de l’œil, c’est-à-dire la rétine, la macula et les vaisseaux, mis une sorte de collyre à intervalles réguliers pendant deux heures pour tester la dilatation des pupilles, et mesuré grâce à différentes machines dont je ne connais pas le nom la taille de l’œil en général, les troubles de la vue éventuels (myopie, hypermétropie, etc.), la motricité des yeux et leur réponse aux stimuli.
Croquette et son anisocorie : et maintenant ?
Nous avons eu la chance de tomber sur une adorable ophtalmologue et son gentil (et comique) assistant, qui ont particulièrement plu à Croquette. Comme je disais, elle a été très sage et semblait plus curieuse des examens qu’on lui faisait passer qu’inquiète ou perplexe. Même l’infirmière venue pour la troisième fois lui mettre le collyre dans l’œil a eu droit à un beau sourire en repartant (bon, elle a aussi d’abord eu droit à une mini gueulante de trois secondes, on va être honnête, mais ça n’a pas duré).
Après tous ces tests, le verdict est tombé : anisocorie physiologique bénigne, a priori. Et j’insiste sur cet « a priori » : à cet âge-là, rien n’est encore définitif. L’œil humain grandit jusqu’à l’âge de 25 ans plus ou moins, et rien ne dit que son anisocorie restera sous contrôle, même si ce sera a priori le cas. Il faut savoir que ce trouble ophtalmique est très courant chez l’enfant en bas âge, car tout son petit corps est en formation, et qu’il se résorbe généralement avec le temps.
Nous allons donc devoir effectuer un contrôle annuel, au moins jusqu’à ce que le trouble disparaisse complètement, pour s’assurer que toute cause potentiellement grave est écartée. On rediscutera d’ailleurs en mars de la possibilité de mettre des lunettes à Croquette pour essayer de corriger le problème. Cela dit, on n’est pas sortis de l’auberge pour autant ! L’entretien avec la gentille ophtalmologue comprenait évidemment une vérification des antécédents familiaux en matière de vue.
Et là, mazette, elle avait de quoi noter. Je devrais penser à nous renommer la famille Taupe, en fait. Non seulement, les problèmes de vue sont un mal aussi répandu dans la famille qu’un rhume au mois de novembre dans une crèche, mais en plus, on ne fait pas les choses à moitié. Chez nous, on n’a pas un mignon 8/10 en vision, où on peut choisir quand mettre ou non ses lunettes, où on n’hésite pas vraiment à partir bosser sans son binocle, où la séance de ciné sans les verres est un peu inconfortable mais « ça va ».
Non.
Ici, on est myopes à -2/10 (si si, ça existe) ou à 4/10 avec de l’astigmatisme, ou avec les deux yeux à des degrés divers et fort éloignés. Oublier ses lentilles avant de partir ? Impossible, on ne trouverait pas la porte d’entrée. Ne pas mettre ses lunettes pour ramper jusqu’à la salle de bain le matin ? Très bonne idée, si on veut se péter un orteil contre un meuble.
Tout ça pour dire que même si (et on croise les doigts) l’anisocorie de Croquette s’avère définitivement bénigne et disparaît un jour, il y a fort à parier qu’elle devra quand même s’astreindre à une visite annuelle chez l’ophtalmo pour contrôler sa vue de taupinette en devenir. Pour l’instant, rien n’est observable à part une hypermétropie légère (et apparemment habituelle pour un enfant de son âge), mais je ne me fais pas beaucoup d’illusions (et la doc non plus).
Bienvenue dans la famille « Chataupe » : j’espère que cet article t’aura plu !
Et toi ? Tu as été confrontée à l’anisocorie ? Connaissais-tu ce trouble ? Y a-t-il des soucis de vue dans ta famille ? Viens en parler…