Le périnée, on sait presque tous (toutes) qu’il existe. On sait qu’il se trouve dans une zone sensible, qu’il sera peut-être découpé pour faire un peu de place pour accélérer la naissance du bébé (coucou épisiotomie, c’est de toi que je parle !), mais bon, globalement, avant une grossesse voire une naissance, il est très abstrait. Donc pour faire court, le périnée (qui existe chez l’homme également mais avec une anatomie sensiblement différente) est un ensemble de muscles qui forment en quelque sorte des hamacs pour soutenir l’ensemble des organes de la sphère uro-génitale soit ta vessie, ton utérus et ton rectum. Donc quand le périnée est tonique, pas de souci, tout est bien étanche, contrôlable et contrôlé. Oui mais voilà, parfois, la grossesse (à cause du poids du bébé) et l’accouchement (à cause de la pression exercée par la tête du bébé) viennent l’affaiblir. Dit comme ça, ça ne semble pas si grave mais en fait, si. Une faiblesse du périnée peut avoir pour conséquence une incontinence urinaire d’effort c’est-à-dire un « moment oups », comme ils disent dans les pubs, quand tu ris, tu éternues, tu cours, tu soulèves un poids… Tout de suite, on cerne mieux le problème. Mais il y a pire : un périnée franchement relâché peut causer des descentes d’organes quand tu vieillis. Ce genre de soucis (incontinence urinaire ou fécale, descente d’organes) est ultra tabou (tu connais une femme autour de toi qui en parle ouvertement ? Non ? Pourtant l’incontinence urinaire d’effort toucherait 10% des jeunes femmes nullipares. Probablement plus, mais c’est tellement tabou que les femmes préfèrent acheter des protections contre les fuites urinaires plutôt que d’en parler à leur médecin.)
Après un accouchement, une rééducation est presque systématiquement proposée. Celle-ci sera à débuter après ta visite post-partum des 6 semaines le plus souvent et tu pourras la réaliser chez un kiné ou une sage-femme.
Kiné ou sage-femme ?
C’est une question d’opportunité (distance de chez-toi, créneaux disponibles…) et comme tout le temps quand il s’agit de questions de santé : de contact humain ! Car oui, comme ces muscles ne sont pas directement sous la peau (comme un biceps par exemple), pour y accéder il faut passer par le vagin. Donc bon, autant ne pas se sentir trop mal à l’aise face à cette personne qui te verra sans culotte pour quelques séances (notes bien : elle s’en moque complètement !). L’avantage d’un kiné est que tu pourras enchainer chez lui les séances de rééducation abdominales si elles sont nécessaires, l’avantage avec une sage-femme c’est qu’elle pourra réaliser ton suivi gynécologique si besoin (prescription de contraceptifs, frottis, …). Kiné ou sage-femme : les séances sont prises en charge par la sécurité sociale (et là : tu aimes encore plus le système de santé français).
Quelle méthode de rééducation ?
Il en existe plusieurs types :
- Manuel : tu contractes ton périnée et le praticien t’indique avec un toucher vaginal quel muscle contracter,
- Par biofeedback : une sonde dotée d’électrodes va enregistrer les contractions de ton périnée et les afficher sur un écran,
- Par électrostimulation : une sonde va t’envoyer des impulsions pour provoquer la contraction des muscles,
- Par la méthode CMP (Contrôle et Maîtrise du Périnée) : à l’aide d’images mentales, tu apprends à contracter des zones spécifiques du périnée. Dans cette méthode, le praticien effectue également des touchers vaginaux pour évaluer la bonne réalisation des exercices.
La méthode privilégiée va dépendre de ton praticien (ses habitudes, ses connaissances), de l’état de ton périnée, de la connaissance que tu as de ton corps, et de la façon dont tu es à l’aise. Les sondes présentent l’avantage non négligeable de ne pas avoir de toucher vaginaux (hormis pour le contrôle initial et final en théorie). Mais tu peux aussi estimer que ton vagin est juste un orifice naturel comme un autre, et que si tu laisses un dentiste te tripoter les dents, tu peux bien laisser une sage-femme tâter ton périnée (comment ça, ce n’est pas tout à fait la même chose ?).
On se dit tout ? J’ai testé deux méthodes avec ma sage-femme, pour chacune de mes deux rééducations (ô combien nécessaires !) : la méthode par biofeedback et la CMP. L’avis ci-dessous ne reflète donc que ma propre expérience.
crédit photo : massagenerds
La méthode par biofeedback
La sonde ressemble à un jouet pour adulte mais avec deux grandes électrodes sur les côtés. Elle est remboursée à 100% par la sécurité sociale, et est prescrite après la première séance avec la sage-femme qui détermine ce dont tu as besoin. Tu l’achètes en pharmacie. Astuce : si tu l’achètes dans une pharmacie à proximité de chez ta sage-femme, il y a un pourcentage de chance non négligeable qu’elle soit en stock. Une séance classique : briefing, branchement et mise en place de la sonde par la sage-femme, et ensuite, c’est parti pour les exercices. A l’écran s’affiche une courbe avec des intensités variables, et tu dois suivre via des contractions du périnée cette courbe le plus possible. Comme ces muscles ne sont pas destinés à être contractés en permanence, tu as des phases de repos. La séance d’exercices dure environ 20min. Avantage : c’est ludique, un peu comme une Wii du périnée. Inconvénient : tu sais que tu contractes mais tu ne sais pas trop quoi exactement.
La méthode CMP
La sage-femme t’explique au début de chaque séance quels faisceaux musculaires tu vas travailler, l’exercice de visualisation associé et c’est parti. Il y a toute une série d’exercices, que tu apprends à maîtriser avec elle (pont-levis, herse, porte, vagues…) et tu dois les reproduire chez toi plusieurs fois par jour et dans plusieurs positions (assise, allongée, debout, accroupie). D’une séance à l’autre, la sage-femme vérifie que tu as bien fait tes devoirs, te présente de nouveaux exercices. Je n’y croyais pas trop, mais au bout de quelques séances (4-5), j’arrivais à contracter mon périnée à droite, à gauche, en avant, en arrière, à sentir que ma vessie et mon utérus remontaient dans mon abdomen (enfin surtout redescendaient lorsque je relâchais la contraction). Avantages : tu connais bien mieux cette partie de ton corps et tu peux (dois !) travailler même après la fin des séances de rééducation. Inconvénient : si tu es très pudique, ce n’est pas très facile.
Globalement, la méthode CMP m’a bien convenu, et je trouve que mon périnée était bien plus tonique après cette seconde rééducation. Je trouve que les exercices de visualisation sont bien pensés, et même si tu n’as pas le ressenti physique tout de suite, la sage-femme peut dire si tu contractes comme il faut ou pas. La méthode par biofeedback me semblait fun, mais avec le recul, je pense que je faisais beaucoup moins d’exercices après.
A n’importe quel âge ?
Oui, même en préventif, avant une grossesse ou si tu es une grande sportive (à cause des chocs répétés, les sportives qui pratiquent des sports d’impact type course à pied, tennis, équitation, trampoline, … sont plus sujettes à des faiblesses du périnée). Encore plus si tu souffres d’incontinence urinaire d’effort. Il est nécessaire de penser à contracter ces muscles le plus régulièrement possible (sans les maintenir contractés en permanence, ils ne sont pas conçus pour !), et notamment lorsque tu soulèves une charge. Le mieux est d’en parler à ton gynécologue ou ta sage-femme, qui pourra te prescrire les séances nécessaires.
Ce n’est pas l’article le plus sexy de l’année mais j’espère que tu as appris des choses. As-tu réalisé tes séances de rééducation ou tu n’en as pas pris le temps ? Penses-tu qu’elles étaient nécessaires ?